Georges PRIVAT fêtera son siècle en août

« A l’aube de mes 100 ans, lorsque je me retourne sur ma vie ou plutôt sur mes vies, je mesure la chance que j’ai eue… »

Il nous était impossible de passer l’été 2023 sans honorer Georges Privat à la veille de son centenaire. Si la commune a à cœur de lui rendre hommage avec une cérémonie prévue au mois d’août, il faudra toutefois s’assurer d’ici là que son état de santé le permette. En accord avec la famille de Georges nous ne manquerons pas de vous tenir informés.

En attendant, nous avons choisi de vous livrer un résumé du livre qui lui est consacré, retraçant son histoire sous la plume De Dominique GUIDECCELLI, rédactrice sollicitée pour l’occasion et à qui Georges a dicté sa mémoire.

« Trois vies sur voie unique – édition Avril 2013 »

La Jeunesse :

Né sur le Larzac, j’use mes fonds de culotte sur les bancs de l’école communale de L’Hospitalet du Larzac avant de fréquenter le Collège de Millau. Je suis encouragé par mes parents, petits épiciers au village qui m’envoient en vacances au Vigan chez une tante. Alors, les cours particuliers dispensés par des Frères religieux me permettent de progresser et d’éveiller mon appétit pour les études. Une première chance pour ma vie future ! Mon bac en poche, j’intègre la Faculté de Droit à Montpellier. J’ai 20 ans mais la vie n’est pas facile… L’occupation allemande a envahi la France entière. Parallèlement aux cours d’Université, je dois travailler tôt le matin, chez un négociant en fruits et légumes pour subvenir à mes besoins. A la maison, j’étudie au milieu des cageots de légumes, faisant abstraction du bruit et des va-et-vient autour de moi. Mais la fermeture des portes de la Faculté, due au durcissement du conflit, m’empêche de terminer mon cursus… Évadé des Chantiers de Jeunesse, j’utilise mon temps libre pour lire des ouvrages de Droit. A la Libération, encouragé par mon Professeur Émérite, je reprends mes études tout en étant pion au Collège de Millau. Deuxième chance qui me permet d’obtenir mon diplôme tant convoité : la Licence en Droit. Me voilà armé pour assurer mon avenir !

La Maturité :

Suite à mon mariage avec Gilberte, née aussi au village, j’intègre la grande famille des Cheminots, la SNCF. Après des stages dans diverses gares pour connaître les différents postes, c’est le départ pour la gare d’Orléans- Les Aubrais, bien loin de mon Larzac natal… Les débuts sont difficiles : me voilà sans logement au cœur de l’hiver 1956 très rigoureux ! Je passe ma première nuit dans la salle d’attente de la gare d’une ville qui porte encore les stigmates des bombardements. Heureusement, la solidarité cheminote fonctionne et me voilà hébergé chez un rescapé des camps de la mort, en attendant d’avoir un logement pour abriter mon épouse et mes deux jeunes enfants. Je travaille en 3/8 et affronte les nuits froides et humides en mobylette pendant 10 ans. L’accueil et la convivialité des Orléanais me font oublier ces décalages horaires. Troisième chance : je suis bien noté par mon supérieur hiérarchique pour une mutation vers la région Midi-Pyrénées, à Montréjeau- Gourdan Polignan (près de Lourdes) pour 3 mois et puis à Rodez comme Chef de Gare pendant 4 ans. Quelle joie de retrouver mon cher Aveyron et de me rapprocher de la famille ! Mais la carrière n’est pas terminée… Me voilà nommé à Brive la Gaillarde où j’ai l’occasion de saluer, sur les quais, Jacques Chirac, à maintes reprises et de tisser des liens amicaux avec toute sa famille. Rencontre déterminante pour ma future vie d’homme politique… 7 ans plus tard, ma nomination à Paris comme Ingénieur Chef de Gare à Paris Austerlitz est le couronnement de ma carrière. J’ai l’honneur et le plaisir d’accueillir, sur les quais de gare, le monde politique ou du spectacle tels Serge Gainsbourg, Jane Birkin ou Lino Ventura… sans oublier le départ des trains des Petits Rouergats en collaboration avec le Père Soulié, aumônier de la Paroisse Aveyronnaise à Paris. Le petit gamin du Larzac n’aurait jamais pensé être promu à un tel poste à responsabilités à la tête de 2000 agents et partager une amitié fidèle avec le Maire de Paris, futur Président de la République.

La Sagesse :

Le 1er janvier 1984, l’heure de la retraite sonne : l’occasion d’un nouveau départ. Ultime déménagement vers mon village natal auquel je suis toujours resté attaché. Être premier magistrat de cette charmante cité depuis 1965 m’a aiguisé l’appétit pour rendre service aux autres et promouvoir l’Aveyron sur le plan national. Passionné par la chose publique, – bon sang ne saurait mentir car mon père côtoyait déjà la gent politique- je suis sollicité par Jacques Godfrain et deviens son suppléant pendant 3 mandats. Expérience très enrichissante, faite de rencontres au gré des campagnes électorales en visite dans tous les villages du Sud Aveyron ou lors des permanences les jours de marché à Millau ou Saint Affrique. Quatrième chance : Echanger, Partager et Aider les autres. Je ne me doutais pas alors, que cet engagement bénévole me conduirait à nouveau à Paris. En 1996, je deviens Député de la 3ème circonscription de l’Aveyron en remplacement de Jacques Godfrain, devenu ministre sous le gouvernement Juppé. Une nouvelle vie trépidante et passionnante s’ouvre devant moi : voyages hebdomadaires vers la Capitale pour discuter les textes de lois ou être le porte-parole de mes concitoyens, et déplacements sur les routes sinueuses de l’Aveyron, le week-end, à la rencontre des électeurs. Mon entrée dans l’hémicycle est empreinte d’émotion mêlée à un sentiment de devoir et d’intégrité car la tâche est lourde de responsabilités.

Aujourd’hui, j’aime me remémorer les divers épisodes heureux que la vie m’a réservé. Ce parcours n’aurait pas été possible sans l’aide précieuse de mon épouse, décédée en 2015, qui a toujours été à mes côtés pour m’épauler dans toutes mes entreprises et avec qui j’ai partagé 66 ans de vie commune. Un long et beau voyage en train à travers trois gares- étapes sur une voie unique avec pour seul bagage : la Foi en l’Avenir. »

Extrait du livre de Georges PRIVAT